Vous allez dire que je le fais exprès, mais le livre dont je vais vous parler utilise à nouveau le spectre du terrorisme jihadiste en toile de fond. En l'occurrence, nous sommes le samedi 15 février 2003, notre héros pense à la guerre qui se prépare en Irak dans le prisme d'une réponse globale au 11 septembre, ce que sa jeune fille, et vous et moi, refusons évidemment. Il craint un attentat dans sa ville de Londres : ils peuvent atteindre qui ils veulent, se dit-il, s'ils ont eu New-York ils auront Londres. Discours alarmiste, sauce Fox News, que l'on nous rabache depuis des années ? Oui, bien sûr. Sauf que Londres a bel et bien été touchée le 7 juillet 2005, et l'aéroport de Glasgow en août 2007. Les pensées alarmistes de notre héros, Henry Penrowne, n'étaient peut-être pas si ridicules que ça.
Henry Penrowne est un homme d'une cinquantaine d'années qui a devant lui un monde qui fonctionne grâce à des gens plus jeunes que lui mais qui est malheureusement dirigé par des gens aussi vieux que lui. Amis lecteurs seniors, ne voyez pas du tout une attaque du petit con que je suis : je m'explique. Le samedi 15 février 2003, Londres connaît la plus grande manifestation de rue de son histoire. L'Europe, souvenez-vous, est bouillante en ce mois de février 2003 - la guerre en Irak est décidée, elle aura lieu, les gouvernements qui l'ont planifiée ne transigeront pas. Mais l'Europe des peuples, elle, se rebelle. Les manifs monstres pullulent sur tout le continent (ok, je compte la Grande-Bretagne dans le continent, arrétez de me casser mon argument). Même les pays qui refusent la guerre manifestent : A Munich, précisément la ville où le ministre des Affaires Etrangères allemand, Joshka Fisher, a cloué le bec au ministre de la Défense américain en lui balançant "I'm not convinced", précisément à Munich donc on assiste à la plus grande manif depuis des années (un ami à moi, présent, m'a dit voir la manif stopper au feu rouge piéton, ce qui ne lasse pas de me faire rire). A Berlin, Madrid, Rome, les jeunes montrent qu'ils refusent ce qu'il croient (à raison?) être une invasion impérialiste, motivée uniquement (et là, ils ont tort) par l'appât du pétrole. "Not in our name", arborent-ils sur leurs badges et leurs pancartes. "Not in my name", je me disais la même chose, en vérité, ce 15 février 2003 (où j'aurais bien voulu aller à la manif de Londres, vivant à côté, mais la loupant parce que justement j'étais ce jour-là à Munich, pour me retrouver à Londres le jour de la manif de Munich - tout faux le mec). Not in my name, vous vous souvenez ? Que le temps passe vite... A peine avait-on voté Chirac en 2002 qu'on était une fois de plus obligés de le soutenir moins d'un an plus tard, et ça commençait à bien faire, là, la proximité intellectuelle avec Chirac, bon, faut pas pousser.
Harry Penrowne serait bien d'accord avec le Not in My Name, d'ailleurs il ne soutient pas ouvertement l'invasion; elle lui semble inéluctable, donc il prend acte. Mais ses pensées vont plus loin : neurochirurgien, il a beaucoup opéré. Il a notamment opéré un confrère qui était passé par les geôles d'Abu Ghraib (longtemps que je n'avais pas entendu parler de cette prison comme d'un lieu ou des Irakiens torturaient, en fait). Hanté, comme tous les gens de sa génération, par le souvenir de l'Union Soviétique, de 1984, du nazisme, de Srebrenica, il est farouchement anti-dictatorial. Chasser l'un des pires dictateurs ? Oui, pourquoi pas, puis qu'on n'a pas su le faire la dernière fois. Ce mode de pensée a beaucoup résonné dans le monde en 2003. Bush ne disait pas autre chose ("with me or against me"). Comme si nous avions alors soutenu Saddam Hussein. Comme si s'opposer au bombardements de villages équivalait à soutenir un dictateur. Marrant, cette année-là la France, comme à son habitude, soutenait une bonne vingtaine de dictacteurs à travers le monde, et c'est pour Saddam qu'elle se faisait épingler par la coalition, applaudir par le reste du monde, comme si elle avait de quoi être fière d'elle.
Henry Penrowne est un homme d'une cinquantaine d'années qui a devant lui un monde qui fonctionne grâce à des gens plus jeunes que lui mais qui est malheureusement dirigé par des gens aussi vieux que lui. Amis lecteurs seniors, ne voyez pas du tout une attaque du petit con que je suis : je m'explique. Le samedi 15 février 2003, Londres connaît la plus grande manifestation de rue de son histoire. L'Europe, souvenez-vous, est bouillante en ce mois de février 2003 - la guerre en Irak est décidée, elle aura lieu, les gouvernements qui l'ont planifiée ne transigeront pas. Mais l'Europe des peuples, elle, se rebelle. Les manifs monstres pullulent sur tout le continent (ok, je compte la Grande-Bretagne dans le continent, arrétez de me casser mon argument). Même les pays qui refusent la guerre manifestent : A Munich, précisément la ville où le ministre des Affaires Etrangères allemand, Joshka Fisher, a cloué le bec au ministre de la Défense américain en lui balançant "I'm not convinced", précisément à Munich donc on assiste à la plus grande manif depuis des années (un ami à moi, présent, m'a dit voir la manif stopper au feu rouge piéton, ce qui ne lasse pas de me faire rire). A Berlin, Madrid, Rome, les jeunes montrent qu'ils refusent ce qu'il croient (à raison?) être une invasion impérialiste, motivée uniquement (et là, ils ont tort) par l'appât du pétrole. "Not in our name", arborent-ils sur leurs badges et leurs pancartes. "Not in my name", je me disais la même chose, en vérité, ce 15 février 2003 (où j'aurais bien voulu aller à la manif de Londres, vivant à côté, mais la loupant parce que justement j'étais ce jour-là à Munich, pour me retrouver à Londres le jour de la manif de Munich - tout faux le mec). Not in my name, vous vous souvenez ? Que le temps passe vite... A peine avait-on voté Chirac en 2002 qu'on était une fois de plus obligés de le soutenir moins d'un an plus tard, et ça commençait à bien faire, là, la proximité intellectuelle avec Chirac, bon, faut pas pousser.
Harry Penrowne serait bien d'accord avec le Not in My Name, d'ailleurs il ne soutient pas ouvertement l'invasion; elle lui semble inéluctable, donc il prend acte. Mais ses pensées vont plus loin : neurochirurgien, il a beaucoup opéré. Il a notamment opéré un confrère qui était passé par les geôles d'Abu Ghraib (longtemps que je n'avais pas entendu parler de cette prison comme d'un lieu ou des Irakiens torturaient, en fait). Hanté, comme tous les gens de sa génération, par le souvenir de l'Union Soviétique, de 1984, du nazisme, de Srebrenica, il est farouchement anti-dictatorial. Chasser l'un des pires dictateurs ? Oui, pourquoi pas, puis qu'on n'a pas su le faire la dernière fois. Ce mode de pensée a beaucoup résonné dans le monde en 2003. Bush ne disait pas autre chose ("with me or against me"). Comme si nous avions alors soutenu Saddam Hussein. Comme si s'opposer au bombardements de villages équivalait à soutenir un dictateur. Marrant, cette année-là la France, comme à son habitude, soutenait une bonne vingtaine de dictacteurs à travers le monde, et c'est pour Saddam qu'elle se faisait épingler par la coalition, applaudir par le reste du monde, comme si elle avait de quoi être fière d'elle.
Ce samedi dans la vie de Penrowne est un jour qui comptera pour bien d'autres raisons : Ce jour-là marque un tournant pour sa vie personnelle, et pour toute sa famille. Une réaction d'événements en chaîne bouleverse ce qui aurait pu être une journée pépère, je ne serai pas plus spécifique. Je dirai juste que Saturday vous marquera parce que ce livre montre l'héroisme tellement humain d'un homme normal qui protège sa famille. C'est un sujet souvent traité mais souvent de façon bien naze et caricaturale. Ici, le style riche sans être lourd rend admirable le récit de cette journée si particulière.
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